L’euthanasie et le suicide assisté, présentés comme des avancées sociétales, dissimulent une réalité bien plus complexe et préoccupante. Nous, soignantes, citoyens et militantes affirmons que ces pratiques ne représentent pas un progrès social, mais un abandon des principes de solidarité et d’humanité.
Le véritable progrès social consiste à améliorer les conditions de vie, non à chercher des solutions simplistes face à des situations complexes. Dans un contexte où les conditions de vie se dégradent et où la santé publique est affaiblie, la priorité devrait être donnée au renforcement des soins et à l’accompagnement des personnes les plus vulnérables. Comment peut-on justifier de permettre aux personnes fragiles de mourir, alors qu’elles ne reçoivent pas l’aide nécessaire pour vivre dans la dignité ? L’euthanasie n’est pas une réponse à la souffrance, mais un aveu d’échec de notre société à protéger les personnes les plus démunies.
La revendication d’un droit à l’euthanasie s’appuie sur l’idée de la volonté libre et éclairée des patientes et patients. Mais cette notion est profondément influencée par des pressions sociales et économiques. Lorsque la société valorise la performance, la jeunesse et l’autonomie, elle marginalise les personnes malades, âgées et fragiles. Le message envoyé est clair : la vie des personnes jugées « non productives » peut être écourtée. C’est là que la solidarité, une valeur essentielle de gauche, doit intervenir. Aider les personnes vulnérables, c’est leur offrir un soutien et des soins de qualité, pas les pousser vers une fin anticipée.
Michel Foucault l’a bien démontré : la médicalisation excessive de la vie, de la naissance à la mort, fait partie du biopouvoir qui régit nos existences. L’introduction de l’euthanasie dans le cadre médical renforce cette emprise, transformant le soin en une possibilité de mise à mort programmée. La frontière entre soulager et éliminer devient floue. Les soignantes et soignants, aujourd’hui chargés de guérir et d’accompagner, pourraient se voir confier le rôle de dispenser la mort. Cela n’est pas seulement un dilemme éthique, mais une remise en question fondamentale du rôle de la médecine et de la société.
Les pays qui ont légalisé l’euthanasie, comme le Canada, ont vu des répercussions sur la disponibilité et la qualité des soins palliatifs. Ce choix politique favorise des solutions rapides et économiquement rentables, au détriment de l’investissement dans le système de santé public. Les personnes les plus précaires, souvent privées d’accès à des soins appropriés, risquent de subir des pressions directes ou indirectes vers l’euthanasie, faute d’alternatives viables. C’est ce que l’on pourrait appeler « l’euthanasie pour raison de précarité », un constat accablant pour une société qui prétend protéger tout être humain.
Nous refusons de voir l’euthanasie et le suicide assisté comme des solutions au manque de soins et de soutien. Nous appelons à un renforcement du service public de santé, à la mise en place de mesures favorisant l’accompagnement digne des personnes en fin de vie, et à une réflexion collective sur les valeurs qui doivent guider notre société. La solidarité, l’entraide et l’humanité doivent rester au cœur de notre engagement. L’euthanasie n’est pas un progrès social ; elle est un symptôme de l’abandon des plus fragiles. Opposons-lui la solidarité et la vie.